Le partenariat " viticulteurs-institutionnels du tourisme " : clé de voûte d'un oenotourisme performant. INTRODUCTION Le vin représente bien plus qu'une boisson. Au-delà de l'enjeu économique ; il est le symbole majeur de nombreuses civilisations et fait partie intégrante de notre histoire et notre culture. A la frontière du tourisme rural et culturel, du tourisme technique et industriel, l'oenotourisme ou tourisme vitivinicole occupe une position unique comprenant des groupes de consommateursspécifiques. Ce secteur du tourisme connaît une phase de déploiement au plan mondial qui peut s'expliquer principalement par les des stocks excédentaires provoquant une " crise mondiale du vin " ainsi que la volonté des distributeurs de mettre en place des circuits ultra courts comme le montre le développement des opérations de marketing téléphonique et la croissance du e-commerce dans ce secteur d'activité. Il faut également rajouter les attentes grandissantes des consommateurs en termes d'authenticité par des contacts avec les terroirs, de découverte et de qualité via la traçabilité des produits. Les formes d'expression et d'organisation touristiques dans les vignobles sont très diversifiées à l'instar des routes des vins, des stages d'initiation à l'oenologie ou encore de véritables sites oenotouristiques. Les actions développées sont également différentes selon les pays. Il peut s'agir d'investissements importants se traduisant par des équipements de grandes tailles comme en Espagne ou en Californie ou par des mises en réseau structurées comme en Italie. En France, si l'ont fait exception des grandes marques et maisons de champagne ou de cognac qui font depuis de nombreuses années de l'oenotourisme un véritable vecteur d'image, de communication et de commercialisation de leur produits ; l'offre peine à intégrer la facette touristique. Cette situation peut s'expliquer par la diversité des vignobles français, des structures viticoles et des objectifs qu'elles poursuivent (Couderc JP, Hannin H, d'Hauteville F, Montaigne E 2006). Toutefois ; apparaissent assez récemment de nombreuses actions d'organisation et d'aménagement mettant en relation des acteurs privés, des structures institutionnelles viticoles et touristiques ainsi que des collectivités locales. L'objectif avoué est d'attirer dans les caveaux, terroirs, régions et propriété aussi bien le néophyte, l'amateur éclairé oubien encore le véritable " Wine Lovers " très exigeant (Belanger J-C 2006). Le vin constitue incontestablement un thème porteur pour le tourisme dont l'originalité se décline à travers une certaine variété de produits et de concepts. Toutefois le développement de produits oenotouristiques implique l'étroite coopération des protagonistes des deux secteurs dans le cadre d'une stratégie " gagnant gagnant " (Brown S, Guyon M-C 2006, Grönroos C 2006). Cette coopération doit d'ailleurs s'effectuer au niveau macro économique (sur un plan national et régional) mais également dans le cadre de partenariats locaux. Dans une première partie ; après avoir brossé un portrait rapide du secteur viticole au plan mondial et national, nous présenterons les forces et les faiblesses ainsi que les facteurs d'évolution du tourisme vitivinicole. Par la suite, à partir de l'étude d'approches régionales en oenotourisme, nous tenterons de montrer de quelles façons les acteurs des deux secteurs vont développer des actions conjointes auxquelles peuvent se greffer d'autres intervenants d'activités connexes. La dernière partie de cet article permettra d'identifier des pistes de réflexion quand à l'élaboration de produits de tourisme viticoles véritablement attractifs pour le consommateur. Cette partie s'appuiera sur une étude de plusieurs initiatives locales repartie sur le territoire national. Il s'agira ici de démontrer l'importance d'un regroupement de moyens entre viticulteurs et institutionnels du tourisme afin de concevoir et développer une offre touristique vitivinicole. PARTIE I : VIN ET TOURISME, UN ETAT DE LA SITUATION. I) Etude du secteur viticole Le premier vignoble s'implanta à Massalia (actuellement Marseille) vers 600 ans avant Jésus Christ. Toutefois, c'est avec le développement de l'empire romain que la culture de la vigne allait connaître une extension systématique à travers la Gaule faisant de la carte des vins, la carte d'identité de la France. Au plan mondial, la vigne couvre près de huit millions d'hectares dans le monde et la France, premier producteur mondial de vin occupe la deuxième position (à égalité avec l'Italie) derrière l'Espagne (source : VINIFLHOR, Février 2007).La production de vin au plan international a progressé de 1% en 2006 soit 280,7 millions d'hectolitre contre 277,9 en 2005 (Source : Organisation internationale de la vigne et du vin 2007). Dans le même temps nous assistons à une stabilisation de la consommation avec une progression moyenne annuelle de 0,5% depuis une dizaine d'année avec de fortes disponibilités, dues essentiellement à l'association d'un niveau de production important et de stock élevés à cause de la forte production de 2004. Dans l'union européenne et la France, la production a augmenté de 3% soit pour 2006 169,7 millions d'hectolitre. Au plan concurrentiel, la France se heurte au dynamisme fort de certains pays comme la Nouvelle-Zélande (progression de 24% sur des volumes relativement réduits avoisinant les 1,3 millions d'hectolitre) ou encore l'Espagne (11% de croissance) et la république Sud Africaine (progression de 6% soit 8,9 millions d'hectolitre). La France reste néanmoins le leader mondial en termes de production avec un chiffre de 53, 45 millions d'hectolitre. Par l'importance de son chiffre d'affaires (11 milliards d'Euros), la viticulture est la première contributrice à la valeur de l'agriculture Française. Toutefois, au delà de ses quelques données statistiques significatives mais un peu " arides " ; le vin joue un rôle important dans l'image de la France au plan international, sa culture, sa qualité de vie et son tourisme. II) Situation et facteurs d'évolution du tourisme viti-vinicole. L'oenotourisme existe depuis longtemps à l'étranger ainsi que sur le territoire national. Nous pouvons considérer qu'il se situe à la croisée d'autres formes de tourisme (Merlin P 2006/6) comme le tourisme de patrimoine, le tourisme industriel (Debos F 1998), le tourisme vert et le tourisme culturel. Sa dynamique actuelle peut s'expliquer en grande partie aux attentes des consommateurs ; notamment des touristes de mieux connaître le vin en tant que produit d'achat plaisir à forte valeur ajouté e émotionnelle (Lewi G 2003, Kapferer J-N 1999) ainsi que par l'envie de dépaysement que procure le monde viticole garant d'un certain art de vivre. Il nous paraît mal aisé de déterminer avec précision le poids du tourisme vitivinicole mais nous pouvons néanmoins identifier ses principaux facteurs de forces et de faiblesse (Choisy C 1996). a) Les facteurs de forces. * Le tourisme vitivinicole répond aux attentes des consommateurs et notamment des touristes et ce, quelque soit leur nationalité. * Il existe une grande diversité des vignobles et des structures viticoles en France et au sein de ses régions ce qui permet de multiples découvertes. * Les divers acteurs du secteur viticole ont une réelle volonté de développer l'accueil des touristes. * Le tourisme vitivinicole est utilisé comme un outil de notoriété par des acteurs institutionnels (Conseil régional et général, communauté d'agglomération et communes) qui investissent à ce niveau de façon conséquente (structure d'accueil importante, formation des hôtesses, collaboration avec les acteurs du tourisme comme les comités régionaux et/ou départementaux du tourisme ou encore les offices du tourisme). b) les facteurs de fragilités * Il existe une disparité culturelle entre les mondes viticole et touristique pouvant entraîner des freins en terme de collaboration entre ces acteurs ou de créativité dans les produits et prestations proposées au consommateur touriste qui recherche une offre globales et multi facette associant le vin à d'autres activités (équitation, VTT, marche, visite de sites, etc.). * Les viticulteurs n'ont pas toujours conscience de l'importance des prestations intégrées pour les touristes (dégustation, visite du vignoble, restauration et hébergement). * Le positionnement plutôt haut de gamme de certains vignobles comme le Bordelais n'est pas compatible avec le tourisme grand public à la différence d'autres vignobles comme le Beaujolais qui sont synonymes de convivialité et des fêtes. L'étude des produits proposés dans trois grandes régions viticoles , à savoir l'Alsace , la Bourgogne et le bordelais nous montre que les forfaits touristiques sont généralement réalisés à la demande du client (à l'exception des autocaristes) et durent entre une demi journée et quatre jours. Les séjours les plus longs vont combiner plusieurs activités à la dégustation et la visite de la propriété (découverte de musée, golf, équitation, etc.) . Les séjours les plus courts vont plutôt être centrés sur des prestations très qualitatives conférant un fort degré d'unicité à ces événements (déjeuner et hébergement dans des châteaux classé, intronisation dans des confréries bachique, etc.). A ce propos, les vignobles constituent à juste titre, des lieux idéaux pour des congrès, des séminaires ou des " incentives ". En parallèle à cet oenotourisme très qualitatif, des infrastructures ont été développées pour l'accueil des touristes de passage à l'instar des routes du vin, véritables parcours vivants et animés. Nous pouvons citer par exemple la route des vins du Bordelais qui il y a dix ans a été complètement réactualisée ou encore les côtes de Blaye, de Bourg et de Bordeaux. Les acteurs viticoles et touristiques mettent conjointement en place des itinéraires assortis d'une signalétique forte et précise ainsi que des chartes d'accueil. Le concept de route des vins est d'ailleurs plébiscité par les différents partenaires des deux secteurs au niveau de son impact direct en termes de fréquentation des sites viticoles et touristiques, de restauration et de nuitées et il est considéré comme le vecteur essentiel de l'organisation et du développement de l'offre touristique vitivinicole. Pour finir, nous pouvons identifier trois axes explicatifs de l'essor de tourisme vitivinicole. * Des contraintes économiques fortes à partir de 1980 qui ont fait prendre conscience à de nombreux viticulteurs que le tourisme vitivinicole permettait de développer les ventes directes et renforçait l'image et la notoriété de leur exploitation. De plus ils pouvaient dans ce contexte rester dans leur propriété (cf. vignoble bordelais). Dans le même temps les investissements de grands groupes et d'institutionnels dans le patrimoine viticole a permis de créer des structures d'accueil. Des maisons de négoce telles que Martell et Hennessy dans le Cognacais ont aussi renforcé l'accueil sur leur site avec comme objectif sous-jacent une volonté de communication institutionnelle accroissant également leur notoriété (Watin-Augouard J 2005). * La volonté de structurer et d'améliorer l'accueil dans le milieu viticole par la mise en place de chartes dans le cadre de la route des vins (Bordelais et Bourgogne). Cette implication peut également prendre la forme d'une action régionale de labellisation (Languedoc Roussillon) surtout dans les vignobles ayant une notoriété et un positionnement qualitatif moins fort. Cette " démarche qualité " se traduit par l'instauration d'un comité de pilotage, de la création d'un mémento juridique à l'attention des propriétaires, des stages de formation portant sur l'accueil ainsi qu'un kit de labellisation. * Le développement du tourisme vert et rural ainsi que du tourisme durable vis-à-vis desquels l'oenotourisme à un rôle transversal. En effet ; comme nous l'avons déjà souligné ; dans leur recherche d'authenticité, de proximité relationnelle et d'un certain art de vivre ; les touristes privilégient la gastronomie, la découverte du patrimoine culturel de leur lieu de villégiature et plus largement du département et de la région concernés, la volonté de sortir des sentiers " touristiques " battus. En tant que véritable produit d'achat et de consommation plaisir ; le vin et le vignoble correspondant s'insèrent indubitablement dans les attentes des touristes. PARTIE II : L'INTERET DU PARTENARIAT TOURISME ET VIN. Comme nous l'avons énoncé dans l'introduction, le développement de produits touristiques vitivinicoles implique la coopération des acteurs des deux secteurs en terme de valorisation mutuelle (Charvet N et Desplats B L 1995). A ce niveau nous pouvons envisager deux approches différentes (Desplat B L 1996). Dans une première approche, le tourisme est considéré comme un outil de valorisation du vin en permettant d'ouvrir de nouveaux débouchés au plan local. Le vin, peut également être utilisé comme un catalyseur de l'identité touristique de sa région d'origine s'il s'agit de marques à forte notoriété. Ces deux approches ne sont pas antinomiques et permettent de déterminer les avantages d'une coopération entre les acteurs touristiques et viticoles. Nous pouvons illustrer ces deux orientations par les approches régionales suivantes. I. Le cas du vignoble Bordelais. Avec cent quinze mille hectares, ce vignoble est la plus grande région viticole française. La ville de Bordeaux a au plan national et international un facteur d'attraction déterminant qui est le vin. D'ailleurs, la première conférence européenne sur le tourisme vitivinicole a été organisée dans cette ville par le conseil régional d'Aquitaine les 21 et 22 Novembre 2006 (http://tourvin.aquitaine.fr/Contact.html) Toutefois, il ne faut pas oublier que de par sa situation géographique, les touristes visitant le Bordelais viennent d'abord pour le littoral atlantique ; la gastronomie et le vin n'arrivant qu'en quatrième position. Nous allons en fait trouver des châteaux qui appartiennent à la mémoire collective (Yquem, Margaux, Saint-Emilion ou encore Mouton Rothschild) qui sont pour le touriste des produits d'appel ( Pelé-Bonard C 2002, Dupont L 2005) et de ce fait pouvant être intégré de par leur notoriété dans la deuxième approche. Dans le même temps, de nombreux petits propriétaires également vont se servir du tourisme pour valoriser leur production par des visites dégustation de leur chai et un accueil personnalisé. Dans le Médoc par exemple, une collaboration des offices du tourisme du Médoc et le conseil des vins de cette région a permis l'édition d'une brochure qui recense deux cent soixante châteaux ouverts au public dont certains sont ouverts toute l'année et peuvent accueillir environ 80 000 visiteurs par an. II. Le cognac, vecteur d'attraction touristique (Desplats B L 1996 op. cit.) La ville de Cognac est indissociable des grandes maisons de négoce (souvent adossée à des multinationales) comme Martell, Hennessy, Otard ou Camus qui commercialisent la quasi-totalité du cognac en France et effectuent plus de 80% de leurs chiffres d'affaires à l'international. Ces marques mènent des politiques de communication commerciale à l'échelle mondiale qui ont un impact sur la ville de Cognac et qui est renforcé par des actions de relations publiques au niveau du grand public à travers la visite de chais. Il s'agit en fait d'une logique de tourisme industriel (GIREST 2003) développée par d'autres marques d'alcool comme pour la Bénédictine et certains champagnes. Cette forme de tourisme va permettre au consommateur de mieux découvrir le produit qu'il consomme. L'objectif essentiel consiste à renforcer la notoriété du produit par sa valorisation, voire sa " mythification " ainsi par une volonté de transparence montrant au touriste client ou prospect que tout est mis en œuvre pour lui présenter une offre de qualité conforme à ses attentes. Toutes les grandes marques de Cognac sont ainsi ouvertes au public avec une visite qui est gratuite dans la plupart des cas et assortie d'une dégustation ou de la remise d'échantillon. L'infrastructure d'accueil doit illustrer le positionnement haut de gamme de ces vignobles (utilisation d'outils interactifs, de vidé o projecteurs et diaporamas, expositions, salles de dégustation et de vente, personnel multilingue,etc.). De plus les visites sont articulées autour d'une thématique spécifique (visite du château de François 1re, écomusée du cognac à Migron,exposition artistique, musée de la tonnellerie, etc.). Ces sociétés vont s'approprier le tourisme comme un vecteur de communication commerciale avec un objectif avéré de renforcement de leur image de marque plus que de développement de l'activité commerciale " stricto sensu " ce qui va en retour accroître l'attractivité touristique de cette région. III. Les acteurs institutionnels face au tourisme vitivinicole. La réussite des deux illustrations précédentes s'explique par une véritable coopération avec les institutionnels du tourisme comme les comités régionaux du tourisme (CRT), les comités départementaux du tourisme (CDT),les offices du tourisme (OTSI), les pays d'accueil et associations liées à des chartes intercommunales. Ces acteurs ont doivent rassembler et structurer l'offre viticole au niveau du territoire qui est sous leur responsabilité ainsi que mettre en place et garantir la promotion touristique de ce territoire. Dans les exemples précédents les produits et marques viticoles sont intégrées dans les politiques et voies d'action au niveau organisationnel et promotionnel du tourisme de loisir essentiellement. A ce niveau les CRT et CDT doivent avoir une démarche dynamisante. Dans les régions viticoles la seule insertion d'informations dans la rubrique gastronomie de la brochure éditée par le CDT ne peut être considérée comme une véritable intégration dans la politique touristique du lieu concerné. Lorsque les CDT associent les productions locales au sein de leur schéma touristique, ils doivent créer une identité forte du territoire considéré traduisant sa spécificité et son attractivité touristique (Frochot I 2007, Lanquar R, Hollier R 2002). Cette valeur ajoutée différenciatrice en terme d'image doit prendre en compte de multiples facettes dont la production viticole ce qui entraîne des difficultés à mettre en cohérence des éléments qui peuvent être disparates. Pour ce faire, ils doivent s 'appuyer sur les acteurs des secteurs concernés disposant du savoir faire en terme de compétences professionnelles, d'organisation et d'accueil des touristes. Toutefois, le fait que les CDT s'appuient sur des professionnels pour accueillir les touristes afin de développer une bonne image peut avoir comme effet pervers de décourager des initiatives individuelles qui pourraient renforcer positivement le maillage de l'offre touristique vitivinicole, surtout lorsqu'il existe de nombreux petits producteurs à côté de grand crus bien établis. Cette situation peut expliquer la vision mitigé e qu'ont certains acteurs viticoles du rôle des CDT. En parallèle, les offices de tourisme (OTSI) vont avoir une fonction de " vitrines oenotouristiques " par la présentation de l'offre existante. La difficulté qui peut se poser est liée au nombre important d'exploitants individuels comme dans le Bordelais et le Cognacais qui décident de commercialiser leurs produits auprès d'une clientèle touristique ce qui entraîne un volume très important de prospectus et dépliants de qualité très hétérogènes. Ces derniers sont plutôt bien représentés dans les OTSI alors qu'ils ont du mal à se faire entendre au niveau des CDT et CRT par rapport aux grandes exploitations. Pour finir, les pays d'accueil qui se positionnent entre les CDT et les OTSI et dont le périmètre d'action concerne quelques cantons en général sont bien adaptés pour créer une dynamique touristique locale. Leur dimension leur permettent d'être plus proches des acteurs locaux, de mieux comprendre leurs attentes, de dépasser les individualismes et de favoriser une réelle synergie appréciée tant par les professionnels du tourisme que les producteurs. PARTIE III : QUELLES VOIES D'ACTION POUR DEVELOPPER DES PRODUITS OENOTOURISTIQUES ATTRACTIFS ? I Les grandes lignes d'un produit touristique vitivinicole (Castaing Y 2007). Les parties précédentes tendent à montrer que l'ont peut élaborer une véritable offre touristique à partir du vin. Bien que la diversité soit de mise dans ce secteur, nous pouvons déterminer les caractéristiques principales d'un produit oenotouristique. Il s'agit dans tout les cas de l'organisation et l'animation d'activités relatives aux séjours de touristes dans des régions viticoles (visite de caves, dégustations, hébergement, restauration et activités annexes liées au vin, aux produits du terroir et aux traditions régionales). Cette offre touristique doit faire découvrir aux touristes le patrimoine culturel, les traditions d'une région rurale et renforcer la dimension culturelle du vin. Une offre Oenotouristique doit également donner la possibilité aux vignerons d'anticiper leur mutation par une remise en question de leur métier et permettre à ces derniers de se développer sur le marché domestique et au plan international par le biais d'une communication plus efficace entraînant une augmentation de leurs ventes directes. Elle initie l'ouverture des habitants de la région concernée à d'autres cultures et modes de vie et mentalités et favorise le contact entre les milieux ruraux et urbains. II Les axes stratégiques possibles de détermination et développement de produits oenotourisques. L'étude de l'offre vitivinicole permet de déterminer deux axes majeurs qui sont illustrés par des expériences de viticulteurs au plan national. a) Une stratégie de valorisation individuelle des vignobles par des investissements pouvant être conséquents (musée du vin, galerie d'art, circuit en 4x4, chambre d'hôte, restaurant, ferme auberge, salle de séminaire et d'exposition). Nous pouvons citer le cas du château des Tourelles sur la route de Bellegarde à proximité de Beaucaire qui bénéficiait dés le début d'une forte notoriété au plan archéologique (site Gallo romain). Son propriétaire a pu, en collaboration avec le CNRS recréer des vins consommés par les romains au premier siècle avant JC qui viennent s'ajouter à sa production viticole d'AOC Costières de Nîmes et de vins de table. Ce vignoble est donc devenu un site de recherche et de production de vins romains ainsi qu'un musée archéologique présentant une cave gallo romaine avec les outils et techniques de l'époque. b) Une stratégie de mutualisation des moyens. Les exemples précédents impliquent toutefois des investissements lourds et la plupart des vignerons n'ont pas les moyens nécessaires à la création de structures d'accueil. De ce fait, émergent des stratégies de coopération et de regroupement des compétences et des singularités. A titre d'exemple, le club des grands vins de châteaux du Languedoc consiste en un regroupement de dix propriétés (Six châteaux, une baronnie, une abbaye et deux folies) permettant de par leur diversité de créer une véritable attraction touristique. En plus de la dégustation de vins AOC ou de vins de pays, il est proposé aux touristes des visites de vignobles, des circuits en 4x4, des stages de dégustation, des accueils personnalisés, des concerts (abbaye de la Valmagne), des salles de réunions, de séminaire et même un atelier de faïences en trompe l'œil (Château de Raissac). Ces deux orientations stratégiques ainsi que les exemples présentés illustrent le fait qu'il existe autant de formes de valorisation touristiques que de producteurs concernés. Nous pouvons toutefois déterminer un certain nombre d'invariants. * Dans la grande majorité des cas ; la valorisation touristique s'appuie sur une notoriété bien établie soit parce que le domaine considéré est bien connu, soit parce que le producteur s'appuie sur une marque à ayant une image forte (Hennessy, Martell, etc.) tout en apportant une " touche personnelle ". * Il faut aussi que la ou les exploitations concernées soient suffisamment solides financièrement pour supporter les investissements au plan structurel (aménagement et équipement du site) et communicationnel (opérations publi promotionnelles, dépliants, site Internet marchand ou vitrine, signalisation, etc.). * Au-delà des moyens financiers et techniques engagés, le plus important reste une forte implication personnelle, un engagement total dans cette démarche véritable facteur clé de succès en termes de valorisation touristique (Tocquer G, Zins M 1999). III Conditions et impératifs de développement du tourisme vitivinicole. Quelque soit la stratégie choisie et les moyens d'action mis en place, il existe certains impératifs à respecter que l'ont peut regrouper dans trois catégories. a) La création d'une véritable identité. Il est indispensable de définir une véritable identité pour le produit oenotouristique que l'ont veut développer ce qui n'est pas sans rappeler le concept d'identité de marque développé par jean Noël Kapferer (op. cit.) et sur laquelle un politique de communication institutionnelle et commerciale cohérente pourra se fonder. Il faudra tenir compte des caractéristiques du produit concernant ses qualités propres (cépages, terroirs,méthodes de vinification, de distillation et vieillissement) mais également les caractéristiques géographiques et climatiques de la région considérée. La similarité entre le nom du produit surtout quand celui ci est le même que la ville ou la région concernée. Cette similarité est porteuse en termes d'images et de valorisation touristique en associant une marque ou un produit connu à un lieu visité. Nous sommes dans le cas d'une zone d'appellation d'origine contrôlée ou d'indication géographique protégée constituant une preuve de la qualité, du caractère spécifique et original du produit concerné (Balfet M 1997). Le positionnement du produit vis à vis de la globalité de l'offre touristique de la région est également essentiel. Il faut que le produit viticole considéré puisse s'intégrer dans une offre cohérente en lien avec ses activités avec une vocation touristique affirmée. b) la situation économique de la région et le degré de collaboration entre ses acteurs. Il semble en effet que la valorisation touristique d'un produit s'appuie sur une économie forte et saine par rapport aux investissements financiers et personnels importants qu'il requiert. Pour qu'il devienne un véritable facteur de dynamisme économique, cette offre touristique doit être structurée et évolutive. Dans le cas ou la région est en difficulté économique il sera plus difficile de développer une offre touristique attractive sauf avec des aides extérieures (fonds européens ou mécènes privés ). Pour finir, il est important de souligner de nouveau la nécessité d'une véritable coopération des acteurs des deux secteurs par la mutualisation de leurs compétences et leurs moyens en termes de gestion et d'accueil touristique. c) L'implication personnelle. Au delà des aspects liés au produit touristique et aux acteurs économiques des secteurs concernés;la valorisation touristique d'un produit vitivinicole comprend surtout une très forte implication personnelle se traduisant par les éléments suivants (Rouzet E 2007): * Une très bonne connaissance sur le secteur du vin dans son ensemble(région, terroir,cépage) et sur sa dégustation (on peut dans ce contexte avoir l'assistance d'un oenologue ou en avoir la formation) afin de pouvoir répondre à toutes les questions. * Avoir des compétences certaines au niveau de la prise de parole en public, de l'animation des groupes ainsi qu'un certain charisme. Il faut également dans cet ordre d'idée,être très disponible. * Maîtriser les différents aspects de la négociation ce qui implique une bonne réactivité, la capacité de conseiller véritablement le touriste et connaître les prix du marché. * Être au moins bilingue Anglais notamment au niveau du vocabulaire technique. * Faire montre d'une culture certaine sur les diverses formes d'art, d'architecture,d'histoire, de géographie et géologie . * Avoir des moyens suffisamment importants pour supporter un seuil de rentabilité de plusieurs mois, voire une année. CONCLUSION : L'OENOTOURISME, UN FACTEUR D'ATTRACTIVITE AU PLAN REGIONAL ; FRUIT D' UNE VOLONTE COLLECTIVE. A la lecture des remarques précédentes, il semble que la valorisation touristique d'un produit vinicole doit reposer sur une filière structurée et performante au plan économique. Le développement des produits oenotouristiques pourra dans ces conditions concerner tout les producteurs et pas seulement les grandes propriétés possédant des marques à forte notoriété. Par ailleurs, quelque soit la forme d'organisation oenotouristique d'un terroir, ses propriétaires doivent respecter des étapes incontournables comme la qualification de l'offre, sa mise en réseau ainsi que des actions collaboratives avec les acteurs de la filière touristique. A titre d'illustration, l'opération " Destination Vignobles " mise en place par la région Aquitaine, développe une charte ainsi que des actions de concertations autour de projets locaux comme dans les Graves et le Sauternes. De façon simultanée à l'organisation de l'offre ; la promotion et la communication des produits et marques oenotouristiques commencent à s'organiser. Témoin ; les " Best of Wine Tourism ", coordonnés par la CCI de Bordeaux vont regrouper huit grandes capitales vinicoles ainsi que des acteurs touristiques locaux et régionaux. Plus simplement, l' " Esprit de Champagne " crée et animé par l'office de tourisme d'Epernay ; organise des dégustations dans ses locaux . Les vignerons de la région vont à tour de rôle faire déguster et promouvoir leurs produits auprès des touristes. Le développement de ces produits vitivinicoles au niveau régional peuvent également préfigurer une évolution plus globale de la communication de la région concernée. Nous pouvons constater en effet que les communications touristiques des collectivités territoriales sont souvent très proches. En effet, afin d'assurer leur promotion touristique, ces dernières vont lister de façon objective et quasi exhaustivement leur richesses patrimoniales. Toutefois, cette communication territoriale va présenter au touriste une succession d'atouts réels mais insuffisamment différenciateurs d'autres régions françaises, voire mondiales. A partir de ce constat, certaines régions comme la Bretagne ont développé une variante par le biais d'une communication de destination. Or, à l'heure actuelle ou la donne concurrentielle est mondiale, cette logique communicationnelle peut se révéler insuffisante. Il serait sans doute plus opportun, avec les risques que cette démarche peut comporter de mettre en place une véritable communication de marque comme l'avait fait durant quatre année la Provence avec la campagne " Les cigales ". Il faut passer d'une communication essentiellement descriptive à une communication de positionnement centrée sur le sens et la valeur ajoutée émotionnelle qu'elle apporte au consommateur touriste (ou non touriste d'ailleurs). Il faut construire une marque qui se fonde sur des valeurs spécifiques au territoire considéré (Genin F 2005). Dans ce contexte, les produits viticoles , notamment les grands crus aux marques à forte notoriété peuvent apporter à la collectivité territoriale leur savoir faire et leur attractivité qui serviront à la fois d'exemple et de base pour une communication de marque territoriale efficace. Dans notre pays, première destination touristique mondiale, la prise de conscience de l'intérêt d'une offre oenotouristique forte et structurée constitue une réponse à une demande locale, domestique et internationale forte. Par des actions communes entre acteurs touristiques et viticoles, l 'oenotourisme doit impulser et s'intégrer à une offre territoriale à forte valeur ajoutée. BIBLIOGRAPHIE 1) BALFET M " L'audit marketing touristique " Edition Economica 112 pages. 2) BELANGER J-C (2006) "Vin et tourisme, un assemblage vertueurx" Revue Espace n°242 p 30. 3) BROWN S, GUYON M-C (2006) "CRM, la gestion de la relation client ", PCW, Le Village Mondial, Pearson Education . 4) CASTAING Y ( 2007) " Oenotourisme : mettre en valeur votre exploitation agricole " Edition Dunod 207 pages. 5) CHARVET N, DESPLATS B L (1995) "Tourisme et vin - réflexion autour du concept de tourisme vitivinicole" IREST, Dossier de synthèse n° 18. 4) CHOISY C (1996) "Le poids du tourisme vitivinicole" Revue Espace n°140 pp 30 -33. 6) CONSEIL NATIONAL DU TOURISME (2000) " Le tourisme en 2010 " Edition l'Harmattan 243 pages. 7) COUDERC JP, HANNIN H, d'HAUTEVILLE F, MONTAIGNE E (2006) " Bacchus 2006 :stratégies et pratiques dans la filière vitivinicole ", Edition Dunod, 304 pages. 8) DEBOS F (Août 1998) " Le développement du tourisme industriel en France, facteur de régénération urbaine : avantages et limites " - Humanisme et Entreprise - n°228 - Pp 1-10. 9) DESPLATS B L (1996) "Un tourisme valorisé ou valorisant" Les cahiers de l'espace n° 140 pp 34-42. 10) DUMONT L (2005) "Le plan marketing du tourisme par la pratique" Edition L'Harmattan 443 pages. 11) FROCHOT I (2007) " Le marketing du tourisme " Edition Dunod 275 pages. 12) GENIN F (2005) "Communication de destination ou communication de marque ?" La Revue des Marques n° 51 pp 56-58. 13) GIREST (Groupement Interdisciplinaire de Recherche en Sport et Tourisme - 2003) " Le tourisme industriel, le tourisme du savoir faire ? " Edition l'Harmattan Collection tourisme et sociétés. 14) GRÔNROOS C (2006) "Service Management and Marketing: A customer relationship approach" John Wiley and Sons Ltd, 3ème Edition . 15) KAPFERER J N (1999) " Les marques, capital de l'entreprise : créer et développer des marques fortes " - Edition d'Organisation - 3éme édition - 575 pages. 16) LANQUAR R, HOLLIER R (2002) " Le marketing touristique " PUF Collection Que sais je ? 125 pages. 17) LEWI G (2003) " Les marques, mythologies du quotidien : comprendre le succès des grandes marques " - Village Mondial - Pearsons Education France - 292 pages. 18) MERLIN P ( 2006) " le tourisme en France : enjeux et aménagements " Edition Ellipses Marketing Collection Carrefours 159 pages. 19) PELE-BONNARD (2002) " Marketing et Tourisme, première rencontre " Edition Chiron 192 pages. 20) ROUZET E (2007) " Le marketing du vin : savoir vendre le vin " Edition Dunod 260 pages. 21) TOCQUER G, ZINS M (1999) " Le Marketing du Tourisme " 2ème édition Edition Gaétan Morin - 303 pages. 22) TREBOUL J B (1998) " Les stratégies des entreprises de tourisme " Collection Que sais je PUF 128 pages. 23) WATIN-AUGOUARD J (2005) "Bénédictine, pour le palais et le palais" La Revue des Marques n°51 pp 42-45 ?? ?? ?? ?? Franck DEBOS .