Création
littéraire en ligne :
stratégies
auctoriales et modèles éditoriaux
Deseilligny
Oriane (ATER, Paris 10 – Nanterre, CRIS-SERIES), Broudoux Evelyne (MCF, Université
de Versailles-Saint-Quentin, CHCSC), Bouchardon Serge (MCF, Université
Technologique de Compiègne, COSTECH)
Mots clefs : revue
électronique, autopublication, chaîne éditoriale, dispositif, auteur.
Alors que les acteurs traditionnels de
la chaîne du livre et de l’écrit apparaissent plus nombreux à s’intéresser aux
pratiques de publication sur le web et commencent à en mesurer les enjeux
économiques, les usagers se sont lancés dans l’autopublication et la
conversation sur le Web, d’abord en créant des sites personnels puis des blogs,
en communiquant sur des forums, et plus récemment en s’inscrivant sur des
espaces communautaires proposant des services en ligne ou le partage de
ressources telles que des vidéos ou des photos.
Le champ littéraire est également
concerné par ces pratiques individuelles ou collectives qui reflètent
l’évolution des outils numériques. Loin des grandes maisons d’édition, un
espace littéraire constitué d’auteurs, de critiques, de revues électroniques,
de forums de discussion a progressivement émergé sur le Web. Très tôt, des
littéraires ont expérimenté l’écriture numérique (hypertextuelle, programmée,
générative, etc.) et ont développé des pratiques originales
d’édition-publication en ligne. Au gré de ces expérimentations, les formes de médiation
littéraire se diversifient. En particulier, les revues littéraires en
ligne illustrent les glissements qui affectent les logiques éditoriales sur le
web. Une des manifestations les plus visibles étant que les lecteurs
participent parfois activement à l’élaboration du contenu critique et
littéraire.
Cet article se fonde sur une étude
réalisée pour la BPI[i]
dans le cadre d’un appel d’offres consacré aux revues électroniques[ii]. Nous avons choisi le
terrain émergent constitué par les œuvres littéraires en ligne. Dans une
approche contrastive, nous avons sélectionné deux dispositifs mêlant
l’élaboration, la sélection, la diffusion et la publication d’œuvres
littéraires numériques. E-critures et
Ecrits…vains ? sont en effet
deux agencements sociotechniques utilisés par les auteurs pour discuter, faire
connaître leurs œuvres, récolter l’écho d’éditeurs et de lecteurs. S’ils sont
différents, l’un comme l’autre s’appréhendent comme des espaces Web
hiérarchisés et organisés, qui proposent des fonctions avancées de publication
(dans les pages Web de la revue Ecrits…vains ?,
sur des sites personnels pour e-critures),
de communication (contact par mail, forums de discussion, listes de diffusion)
et d’archivage. Ces deux dispositifs se distinguent par la nature des œuvres
publiées en ligne : celles que propose e-critures.org se situant davantage
du côté d’une littérature proprement numérique par les formes multimédiatiques
et les outils qui interviennent dans l’acte de création. Mais tous deux sont
représentatifs d’une part de l’utilisation du support numérique et informatique
dans les pratiques d’écriture littéraire, et d’autre part des structures
sociales et éditoriales dont se dotent les acteurs pour promouvoir et
médiatiser les productions.
Notre hypothèse concernait les modes de
légitimation au sein du champ littéraire. Notamment, il nous semblait
qu’au-delà des différences qui marquent leurs approches de l’œuvre littéraire,
un des enjeux communs de ces dispositifs sociotechniques résidait dans la
volonté de proposer sur le Web des relais aux procédures classiques de
publication - jusqu’à éventuellement créer des pôles éditoriaux autonomes. Nous
verrons dans quelle mesure cette hypothèse s’est vue confirmée au plan des
stratégies auctoriales mais aussi infléchie du point de vue des logiques
éditoriales. Après une présentation globale des deux dispositifs, nous
envisagerons les cadres éditoriaux principaux qui structurent l’organisation d’e-critures et d’Ecrits…vains ? pour ensuite dégager les modalités à travers
lesquelles émergent des modèles plus innovants et propres au support numérique.
1. Présentation
des deux dispositifs
L’étude s’est attachée à penser ensemble les formes d’organisation
sociale, les circuits d’élaboration et de promotion des œuvres et les
agencements communicationnels qui les soutiennent, afin de porter un regard sur
l’ensemble de la chaîne éditoriale et éventuellement de dégager des filiations
ou des ruptures par rapport aux modèles éditoriaux liés à l’imprimé. En outre,
les modes de valorisation du support et des ressources numériques (à travers
des sites personnels, des listes de diffusion, des groupes de discussion ou des
forums directement insérés dans nos deux dispositifs ou gravitant autour d’eux)
envisagés en termes de publication, de communication et d’interaction ont
attiré notre attention dans la mesure où l’exploitation de ces outils n’est pas
stéréotypée, mais toujours contextuelle et négociée entre acteurs techniques et
sociaux.
E-critures apparaît comme un dispositif technique complexe, articulé
autour d’une liste de discussion très active consacrée à la « littérature
informatique »[iii]
– créée en 1999 - et d’un site fédérateur de contenu[iv], qui recense des œuvres
de littérature numérique mais qui ne les « publie » pas à proprement
parler. Aucune œuvre littéraire n’y est en effet stockée. Pour y accéder, le
lecteur passe par une interface web renvoyant aux sites de revues et d’autopublication des membres d’e-critures. Car si le groupe de
discussion est bien le point d’ancrage d’une communauté d’auteurs, de
théoriciens, d’universitaires, de critiques, il s’insère dans un environnement
électronique beaucoup plus large pour des individus à l’activité créatrice
démultipliée sur le réseau.
Au contraire, Ecrits…vains ? se définit comme un site éditeur[v] et une revue littéraire
électronique qui publie à un rythme bimensuel
des œuvres littéraires en prose et en poésie – qui sont ensuite
archivées dans la « librairie[vi] » - dans lesquelles
textes littéraires, « mise en page » et travaux de révision renvoient
à la tradition imprimée. Toutes les activités de la communauté d’auteurs et de
lecteurs d’Ecrits…vains ?(publications
de la revue, forum de discussion, ateliers d’écriture notamment) dépendent donc du site Web. A
l’organisation centralisée et hiérarchisée de la revue Ecrits…vains ? dirigée par un comité éditorial détaillé sur le
site, et à son dispositif à emboîtement
s’oppose la structure distribuée et
ouverte d’e-critures scindée en une
liste de discussion, le site principal et les sites personnels des membres de
la liste. Alors que la page d’accueil d’ecrits-vains.com centralise toutes les
rubriques de lecture, les fonctionnalités offertes et les services,
e-critures.org apparaît comme un site portail permettant à une communauté
d’identifier et de recenser ses œuvres, ses auteurs, et de produire des textes
théoriques.
2. Chaînes
éditoriales
Dans la tradition du livre, l’objectif
de l’éditeur est d’articuler les opérations de création (production), d’édition
(évaluation) et de diffusion (publication) pour produire des biens culturels et
informationnels. La chaîne éditoriale repose ainsi sur des étapes récursives et
séquentielles calées chronologiquement. Au cœur de la fonction éditoriale, les
processus de sélection de texte (editing)
et de publication (publishing)
s’influencent mutuellement. Par rapport à cette distribution organisée et
temporelle de la chaîne éditoriale, le Web tend à bouleverser l’ordre des
opérations. Les trois étapes s’agencent différemment au sein des dispositifs
qui nous occupent, témoignant ainsi des glissements qui s’opèrent à l’endroit
des modèles éditoriaux classiques.
Les rouages du mécanisme éditorial
spécifiques aux deux sites web sont explicites (procédures de soumission,
d’évaluation et de diffusion des textes et des œuvres) car l’on a affaire à
deux communautés qui cherchent à élargir leur public et leur audience sur le
Web. Pourtant, au-delà de cette fonction de médiatisation, la visibilité de la
chaîne éditoriale ne recouvre pas exactement les mêmes enjeux dans l’un et
l’autre cas. La lisibilité des opérations éditoriales est un indicateur majeur
quant aux représentations attachées à la fonction éditoriale et aux mutations
que le support numérique peut y introduire.
Site personnel à l’origine publiant des
auteurs méconnus – voire ignorés par l’édition papier - et ayant rencontré le
succès, Ecrits…vains ? s’est
rapidement organisé en une équipe permanente de chroniqueurs et en deux comités
de lecture (l’un pour la prose et l’autre pour la poésie) composés d’une
quinzaine de personnes. A cette organisation éditoriale classique et bien huilée
correspond une mise en visibilité explicite[vii] des procédures que
doivent suivre les auteurs pour soumettre des textes à l’appréciation de la
revue. La structure du site ecrits-vains.com privilégie le parcours d’auteur et
la soumission des œuvres au comité de lecture[viii]. Si l’acceptation par
ce dernier est donc la condition de la publication dans les pages Web de la
revue, on observe en revanche sur
e-critures.org un renversement des opérations éditoriales (au sens générique).
En effet, une rubrique du site
intitulée « comité de lecture » liste quelques noms, mais aucune
explication n’est donnée sur les procédures éditoriales ou la distribution des
tâches. Plus encore, bien que la rubrique « Soumettez une œuvre »
s’identifie comme une procédure classique, l’étude d’usage révèle que la
plupart des auteurs contournent les opérations de filtrage, d’évaluation et de
sélection en jouant sur les possibilités techniques non prévues par le
rubriquage. Dès lors qu’il s’est inscrit comme « membre » d’e-critures, chaque internaute dispose
d’un espace personnel de présentation biographique. Dans la pratique, nombre
d’auteurs y indiquent les adresses électroniques des sites où sont déposées
leurs œuvres. Contournant le processus d’évaluation par le comité de lecture, les
auteurs renvoient directement les lecteurs à leurs œuvres par ces liens
hypertextuels. Ce détournement du dispositif technique à des fins
d’autoréférencement et de visibilité auctoriale constitue donc une première
rupture par rapport à la chaîne éditoriale classique. Il est également l’indice
d’une volonté de recenser et identifier les œuvres et les auteurs d’une
communauté littéraire en cours de constitution, et recouvre prioritairement des
objectifs de médiatisation.
Un second glissement trouve ses sources
dans la nature technique et matérielle de l’œuvre numérique. Défini
classiquement comme mise en forme finale d’une production stabilisée de manière
définitive[ix], le processus de
publication est soumis à rude épreuve sur Internet. La publication d’une œuvre
numérique n’est jamais définitive dans la mesure où elle peut toujours être
remaniée, actualisée et modifiée. D’ailleurs, sur e-critures.org, on note la
possibilité offerte aux membres de la communauté de modifier leur œuvre. Car,
comme l’ont signalé certains auteurs sur la liste de discussion, cette
potentialité d’évolution permanente des œuvres tient aussi dans la volonté
d’exploiter dans la création littéraire en ligne les propriétés du réseau et sa
plasticité technique. Les versions peuvent ainsi se succéder et les œuvres être
abritées à différents endroits en différents moments.
Ces
pratiques de modification des œuvres n’aident cependant pas à concevoir des
cadres à partir desquels on peut les saisir de façon stable. Si, contrairement
à e-critures.org, Ecrits…vains ?
arrive à publier des textes à un rythme régulier, c’est aussi parce que les
œuvres y sont stabilisées et que leur nature, spécifiquement textuelle,
correspond à des canons et des genres traditionnels. Les différentes
initiatives menées par certains acteurs majeurs d’e-critures pour créer une revue (Literatique d’Eric Serandour, Si
loin si proche de Xavier Malbreil, Transitoire
observable de Philippe Bootz…) ont pour certaines été des projets innovants
et pérennes mais n’ont pas pu rassembler l’ensemble des membres de la liste.
Avec e-critures.org, on est par conséquent plutôt du côté de la juxtaposition
d’œuvres (que de l’intégration), de la diffusion (que de la publication), de
l’accès (que de la sélection). Toutefois, parce que l’objectif des fondateurs
et des membres d’e-critures est sans
doute moins la sélection d’œuvres et leur publication (ce qui n’exclut pas leur
évaluation) que la construction de dispositifs d’où saisir l’activité de
création littéraire numérique, e-critures.org tend à mettre en place des
procédures innovantes (le détournement notamment) de mise en visibilité de
leurs œuvres.
Compte tenu de cette stratégie
auctoriale d’autoréférencement, on peut se demander si le terme d’édition n’est
pas abusif dans le cas d’e-critures,
tant le principe du site masque le travail d’évaluation se déroulant en aval de l’autopublication. Dans la
pratique en effet, les œuvres autoréférencées se voient commentées et discutées
au sein de la liste, provoquant parfois de longs débats critiques et théoriques
qui poussent les auteurs à modifier, voire corriger leurs œuvres. On assiste
ici à un renversement du modèle éditorial puisque les opérations de filtrage et
de publication sont inversées dans l’ordre temporel. Selon des modalités diverses,
mais sous l’influence de logiques auctoriales dynamiques, la chaîne éditoriale
classique se voit bousculée sur le Web : les étapes sont inversées ou se
chevauchent, elles sont mobiles et non plus linéaires. Plus qu’un espace ouvert
massivement aux pratiques spontanées de diffusion, le Web se révèle ainsi comme
un vaste laboratoire de création et d’échanges critiques autour des œuvres,
susceptible en outre d’abriter de nombreux modèles éditoriaux.
3. Diversité des
modèles éditoriaux
Le polissage des œuvres à travers leur
passage par les trois phases de production, d’évaluation et de publication
n’est pas séparable des cadres sociaux (acteurs et communautés), techniques
(dispositifs matériels), ou critiques (critères d’évaluation, théories) qui
fondent la valeur du travail éditorial et sa relativité. Les différentes
manières dont le dispositif E-critures
(la liste et le site) et celui d’Ecrits…vains ?
assurent ce type de fonction nous permettent à présent de décrire des
modèles émergents. Il convient en effet de souligner la pluralité des
circulations possibles des textes et des espaces de publication sur le Web.
Outre les deux modèles déjà évoqués – l’autoréférencement pour e-critures, la chaîne éditoriale
classique pour Ecrits…vains ?
- apparaissent des parcours parallèles
ou complémentaires pour les œuvres, qui trouvent là des tremplins inédits, des
médiations techniques à tous les stades de leur état (brouillon, en devenir ou
« achevé ») et des publics spécifiques.
Parallèlement au circuit de soumission
d’œuvres aux comités de lecture, ont été mis en place sur ecrits-vains.com des
espaces relais qui apportent un début de diversification au schéma éditorial
traditionnel. La rubrique « Théma[x] » et le forum offrent
ainsi, dans des optiques différentes, des espaces de publication spécifiques et
alternatifs.
Le forum de discussion a été rapidement
investi par un public d’auteurs et de lecteurs soucieux d’obtenir un écho
immédiat à leur production littéraire. En insérant des nouvelles ou des poèmes
dans les messages qu’ils postent sur le forum, ils réalisent là aussi un
détournement du dispositif en un espace de « publication » sans
filtre ni sélection par un tiers. Le succès qu’a rencontré cette pratique de
médiatisation spontanée a rapidement conduit les responsables
d’ecrits-vains.com à créer une rubrique spécifique du forum – intitulée
« Vos textes » - dédiée à la publication et au commentaire de textes
par les lecteurs et la communauté d’auteurs de la revue. Convenons toutefois
que ces pratiques relèvent davantage de l’édition (puisque le texte proposé
peut subir des modifications destinées à son amélioration) qu’à de la
publication, puisque sur le forum la mise en forme est largement réduite par
les contraintes et le préformatage technique.
Du côté d’e-critures, la nature numérique des œuvres et les stratégies de
visibilité qui animent les auteurs tendent à déployer davantage des logiques
d’autopublication. Par autopublication, nous entendons la mise en forme, par
l’auteur individuel ou collectif d’un contenu (ici, multimédia), dans l’espace
électronique du Web[xi]. Il s’agit donc d’un
modelage technico-communicationnel unique dont l’objectif est double :
faire œuvre et être diffusé sur le réseau. Se lancer dans l’autopublication,
pour les acteurs d’e-critures signifie
aussi accepter de se passer d’intermédiaire et de l’autorité dont jouit un éditeur, de ne pas se laisser
enfermer dans des catégories génériques ou des critères de collection, de
public-cible. L’autopublication peut aussi s’inscrire dans une conduite
créatrice singulière visant à s’affirmer auteur en marge des instances
traditionnelles de légitimation et des autorités établies. Ces pratiques
« autoritatives [xii]» correspondent à la
construction par l’auteur lui-même des conditions de sa reconnaissance dans
l’univers électronique, celles-ci pouvant être d’ordre technique (conception de
dispositifs médiatiques), social (inscription dans des réseaux de sociabilité
et de création numérique), politique (réflexion sur le champ littéraire et
l’engagement de l’auteur…). L’autoritativité est une modalité de
l’auctorialité, une forme du « devenir auteur » qui concerne non
seulement les phases de conception mais aussi celles de légitimation du travail
accompli. L’autoritativité n’hésite pas non plus, nous l’avons vu, à défaire
tout formatage technique ressenti comme enfermant ou à en détourner la fonction
communicationnelle.
Les acteurs d’E-critures et d’Ecrits…Vains ?
mettent en place des modalités différenciées du devenir auteur, les uns se
situant davantage du côté de l’autoritativité et les autres cherchant à
s’insérer dans des processus éditoriaux classiques, fondés sur des opérations
distinctes, hiérarchisées et sélectives. Apparaissent ainsi différents profils
d’auteurs qui témoignent de la variété des postures auctoriales que le Web
favorise.
Pour autant, on peut identifier au sein
de nos deux communautés des auteurs qui, par leurs pratiques, confortent l’idée
d’une hybridation des dispositifs sociotechniques en ligne et hors ligne. Si
les deux communautés se sont créées majoritairement sur les réseaux, des
principes de complémentarité fortes s’exercent entre les activités pratiquées
sur et hors du Web. E-critures
revendique certes une littérature hors livre, mais certains auteurs
entretiennent des liens étroits avec l’édition imprimée, comme par exemple
Lucie de Boutiny. Cette hybridation des espaces éditoriaux est évidemment plus
frappante pour les auteurs d’ Ecrits…Vains ?
puisque nombre d’entre eux ont eu l’occasion de publier des œuvres dans des revues
imprimées ou dans des recueils poétiques. Le partenariat noué entre Ecrits…vains ? et la
librairie-galerie Racine autour de la publication de plusieurs recueils de
poésie achève de confirmer cette interpénétration des espaces éditoriaux.
Conclusion
L’étude réalisée sur deux dispositifs
de publication et de communication en ligne révèle la pluralité des parcours et
des médiations offerts aux œuvres littéraires. La recomposition, sur le support
numérique, des rapports entre logiques auctoriales et stratégies éditoriales
diversifie par conséquent aussi bien les profils d’auteurs que les structures
sociotechniques de publication. En marge des instances éditoriales
traditionnelles, auteurs et lecteurs trouvent sur le Web des espaces de débats
renouvelés. La médiatisation des œuvres offre à leurs auteurs des opportunités
inédites pour les retravailler et font de ces dispositifs des laboratoires de
créativité. Ces débats critiques tendent par ailleurs à souder des communautés
d’acteurs de la littérature électronique en des espaces spécifiques qui créent
des pôles lisibles et identifiables de création numérique.
Il resterait à envisager les modalités
spécifiques de cette critique à l’endroit des œuvres numériques et de leur
nature plurisémiotique, dynamique et plastique. A cet égard, les échanges qui
ont lieu sur la liste e-critures
interrogent fondamentalement les notions d’œuvre, de genre, de dispositif,
jusqu’à proposer des catégories émergentes pour l’appréciation de la
littérature numérique. Notamment, l’importance accordée au support numérique
dans la production des formes tend sans doute à déplacer les critères
d’évaluation des œuvres et la lecture qui en est faite vers une esthétique de
la matérialité qui accorde au format et à la technique une attention
renouvelée.
[i] Bibliothèque Publique d’Information (BPI) du centre Georges Pompidou à Paris.
[ii] Bouchardon
Serge. Broudoux Evelyne. Deseilligny Oriane. Ghitalla Franck. Un laboratoire de littératures :
littérature numérique et Internet. Paris : Bibliothèque publique
d’information/Centre Georges Pompidou. 2007. 266 p. (Etudes et recherche)
[iii] En deçà des débats liés aux formes et aux outils convoqués dans l’acte de création littéraire, les terminologies employées pour qualifier la littérature « informatique », « numérique » ou « électronique » indiquent un champ d’œuvres créées avec et pour l’ordinateur.
[iv]
http://www.e-critures.org
[v]
http://ecrits-vains.com
[vi]
http://ecrits-vains.com/librairie/index.htm
[vii]
http://www.ecrits-vains.com/divers/comites.html
[viii] Les œuvres reçues sont anonymisées, cataloguées et transmises aux comités de lectures qui les évaluent et les sélectionnent. En cas de refus, l’auteur reçoit une réponse motivée, composée des commentaires du comité de lecture.
[ix] Rebillard Franck, Chartron Ghislaine, « Quels modèles pour la publication sur le web ? Le cas des contenus informationnels et culturels », Actes du XIVe Congrès SFSIC, pp. 303-310, 2004. En ligne : http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00000986.html
[x] La rubrique Théma,
dirigée par Anita Beldiman-Moore, directrice de la revue, propose aux lecteurs
et aux visiteurs du site l’écriture de textes à partir d’un thème générique et
spécifique, à un rythme trimestriel. La responsable de la rubrique est ici la
seule juge des textes qu’elle choisit de retenir pour la publication sur le
site et envoie des commentaires précis aux auteurs des textes refusés.
[xi] Dans la
logique de cette définition, il apparaît que la production d’un contenu sur une
plate-forme de publication logicielle telle que les CMS, les blogs ou les wikis
n’est pas assimilable à de l’autopublication, puisque le dispositif est
préexistant au texte ou à l’œuvre ; il s’agit plutôt d’une forme
d’auto-édition.
[xii] Broudoux
Evelyne, Outils, pratiques autoritatives
du texte, constitution du champ de la littérature numérique.Thèse soutenue
à l’université Paris 8 en décembre 2003. En ligne :
http://tel.ccsd.cnrs.fr/documents/archives0/00/00/67/60/index_fr.html