Le rôle de la gestion de l'information dans la construction des savoirs

de la force de vente

 

 

 

 

 

 

 

Contribution de : Corinne DUMAS

Doctorante en Sciences de l'Information et de la Communication

 

Adresse professionnelle : Laboratoire LePont

Université de Toulon et du Var

BP 132

83 957 La Garde cedex

Tel : 04 94 14 25 75

Fax : 04 94 14 25 37

Messagerie : corinne.dumas@laposte.net

 

 

Yann BERTACCHINI

Maître de Conférences- Université de Toulon et du Var

 

Adresse professionnelle : I.U.T «Services et Réseaux de Communication»

200, Avenue Victor Sergent

83 700 Saint-Raphaël

Tel : 04 94 19 66 02/03

Fax : 04 94 19 66 09

Messagerie : bertacchini@univ-tln.fr

 

 

Résumé : La force de vente constitue un noeud d'informations entrantes et sortantes. Une gestion de l'information par les commerciaux est incontournable et pratiquée, mais en grande partie de manière informelle. Elle les révèle en tant qu'acteurs de veille. La formalisation de ces pratiques permettrait la reconnaissance de groupes de travail transversaux.

 

Abstract : Salespeople constitute a node of input and output information. They informally often practice the management of information. The recognition of their contribution to competitive intelligence should reveal the existence of transverse working party within the company.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le rôle de la gestion de l'information dans la construction des savoirs

de la force de vente

 

 

 


I- INTRODUCTION

 

La prise en considération des besoins du client prend aujourd'hui une place majeure dans les stratégies des entreprises. Une adaptation constante à l'évolution du marché ainsi que la pression de la concurrence amènent la force commerciale à une remise en question permanente de ses savoirs dans l'activité de travail. En outre, les savoirs procurés dans la relation au client deviennent pour l'entreprise un enjeu dans la gestion stratégique de l'information.

 

Mettre le client au coeur de ses ambitions sous entend que l'ensemble des personnes concernées par le service aux entreprises doit apprendre à travailler ensemble, y compris le client, ce qui signifie que le client participe activement au service. « Ils en sont, à leur façon, les agents officieux » [MISPELBLOM, 1991]. Les contours de « ce faire ensemble » se définissent en fonction de l'événement, du traitement des dysfonctionnements et de l'existence d'un réseau relationnel qu'aura su créer et pérenniser le commercial, mais le déroulement des actions, les ajustements, les contournements pour arriver à la mise en place du service en interne, révèlent une certaine autonomie de la part des agents en contact avec le client comme de ceux du « back office ». Les échanges procurés dévoilent la constitution de « groupes informels de travail » agissant sur l'ensemble du parcours de la prestation. Notre propos a pour vocation de montrer que la gestion de l'information par les commerciaux constitue le fondement de leur activité de service et permet de mettre à jour des compétences, notamment celle d'acteurs de veille,  jusqu'ici non reconnue, voire inconnue.

 

II- CONSTAT DES ACTEURS EN PRESENCE

 

2.1-Professionnalisation de la force de vente

 

L'entreprise que nous étudions est une société du secteur tertiaire qui développe une offre de produits et de services destinée aux particuliers et aux entreprises. Au sein de cette entreprise réside une relative tradition administrative ; une stratégie mettant le client « au coeur des préoccupations » de l'entreprise est assez récente.

Notre recherche se limite à la prise en considération de l'offre « entreprises » dans la mesure où nous étudions l'évolution des compétences de la force de vente dédiée aux entreprises. La force de vente se compose d'équipes de vente généralistes et de vendeurs spécialistes issus en grande partie de la promotion interne. Si pendant quelques années son rôle a été essentiellement de vendre diverses prestations destinées aux entreprises, la prise en considération de la satisfaction du client et de la mission du vendeur en tant que « développeur de portefeuille » font progresser la notion de vendeur, vers celle de conseiller, d'apporteur de solutions. La stratégie commerciale de l'entreprise prône une professionnalisation de ces métiers, ce qui signifie que la force de vente devra développer des compétences relatives à la cognition, la pédagogie, la compréhension et l'interprétation.  

 

2.2-Le conseil, une nouvelle compétence requise

 

Le fait de positionner le commercial plus en tant que conseil que vendeur renforce la nécessité de détenir la capacité de maîtriser, à la fois, le choix d'une information utile mais aussi la gestion de l'information. L'acte de vente pouvait se réaliser en grande partie grâce à l'apprentissage d'une technique théorique et pratique. Mais le statut de conseil, l'investissement toujours plus poussé auprès du client amènent les commerciaux à une mobilisation plus intense des ressources informatives qu'ils doivent savoir utiliser à bon escient. La qualité du conseil suppose l'acquisition de connaissances multiples du type : techniques de vente, nature des produits vendus, culture générale, communication, pédagogie, management..., dont la plupart demande une mise à jour permanente en fonction de l'action à mener, du contexte économique et de l'évolution de l'environnement autant interne qu'externe. Elle nécessite un savoir faire qui va se traduire dans le service, par une adaptation très fine de leurs connaissances au problème spécifique du client.

 

2-3- Entre « producteurs » et « usagers » du système d'information

 

Nous adoptons la formule de Carmagnat qui souligne que « le champ de l'information peut être défini comme le lieu de rencontre entre l'offre des producteurs et les pratiques de consommation des usagers » [CARMAGNAT, 1993]. A ce point de rencontre, se trouve, pour notre recherche, la force de vente qui se meut à la fois dans l'univers du client et dans celui de l'organisation à laquelle elle appartient. Dans le système d'information, l'ensemble du personnel d'une entreprise est à la fois producteur et usager. Ces deux notions, pour ce qui concerne la force de vente, méritent d'être explicitées. Dans la mesure où le commercial est en grande partie dans la sphère du client[1] et en dehors du contrôle, lui permet, pour un temps de s'affranchir des contraintes de son rôle « d'usager » en interne, notamment en ce qui concerne les procédures. Pour Michel de Certeau, ces deux groupes (producteurs et usagers), ne sont pas à égalité. « Ce sont les producteurs qui déterminent les territoires de leur action et celle des usagers » [DE CERTEAU, 1980]. Cette remarque est valable dans le sens où on impose aux commerciaux une offre (contenus, procédure, outils), qui répond à des logiques et des intentions décidées en dehors d'eux. Ces procédures légitimes rentrent dans une stratégie créant des normes et une rationalisation du travail dont le commercial « usager » se libèrera en adoptant une posture d'attente d'opportunités, de détournement pour aboutir à la création du service. Ces réactions sont d'autant plus compréhensibles que l'entreprise se trouve dans une situation concurrentielle sur une grande partie de son offre. En effet, comme le souligne Dejoux, dans ce cadre « les activités professionnelles sont dans la plupart des cas composées de situations non prédéterminées face auxquelles les individus doivent s'adapter et proposer des solutions satisfaisantes. De ce contexte l'acteur retirera un supplément de compétences : la compétence marginale » [DEJOUX, 2001].

 

III- LA CONSTRUCTION DES SAVOIRS METIER

 

3.1- Le poids des valeurs

 

L'essence même du métier réside dans l'échange d'informations en interne comme en externe. Nous considérons comme Bourre, que « l'information est sens, et qu'elle n'est véritablement information que si celui qui la reçoit est en mesure de maîtriser les savoirs, les savoir faire et les langages nécessaires à sa compréhension, puis à son appropriation » [BOURRE, 1993]. La transmission de l'information est impossible « sans cette résonance cognitive, premier degré de communauté entre l'émetteur et le récepteur » [BOUGNOUX, 1992]. Cette « résonance cognitive » se bâtit sur des valeurs communes. Les commerciaux, qui, dans le passé ont transité à des postes faisant partie de la production ont une empreinte identitaire en commun avec les agents de la production. C'est un acquis qui permet d'accélérer l'action commerciale.

Le vendeur utilise un ensemble d'informations qui provient de l'extérieur ou qui est produit et échangé en interne. Comme le souligne Guyot « l'acte de travail est donc constitué de deux univers, l'un tout à fait personnel de gestion des activités, et l'univers social des interactions avec les autres pour s'ajuster et se coordonner » [Guyot , 2000]. Cette activité de communication s'insère dans le processus plus large de la construction des savoirs pour rendre disponibles aux autres les connaissances personnelles, tacites et informelles [HATCHUEL, 1992]. Le vendeur, s'il répond à un nombre important de prescriptions à travers la formalisation de certaines informations  « sous contrôle », en détient aussi de manière beaucoup plus informelle et qui restent la plupart du temps inconnues du collectif de travail.

 

IV- APPROPRIATION DE L'INFORMATION EXTERNE

 

4.1- Nature de l'information externe

 

Les informations externes sont de deux ordres : les connaissances acquises par le commercial (contexte économique, environnement, la plupart du temps dans la presse locale ou nationale), et les informations issues de la relation client.

 

Pour se rendre compte des problèmes que pose le traitement de l'information, il est nécessaire d'en décrire la nature :

 

Les informations issues d'un entretien client peuvent être relatives à (non exhaustif) :

 

-          la partie de l'activité de l'entreprise qui concerne directement l'éventuel futur prestataire

-          l'activité de l'entreprise

-          les projets de l'entreprise,

-          l'organigramme, la structure de l'entreprise, les interlocuteurs potentiels

-          les clients de l'entreprise et ses fournisseurs

-          les produits déjà utilisés

-          les problèmes de SAV rencontrés, leur traitement

-          la concurrence (prix pratiqués, service)

-          les attentes et besoins du client

 

Cette prise d'informations se densifie en même temps que la relation commerciale se pérennise. L'information externe va être confrontée aux informations que le commercial détient déjà sur les sociétés qui ont la même activité. L'appropriation de cette information engendre leur transformation en connaissance. A ce stade, « l'information est devenue connaissance après traitement informel par le cerveau humain qui va intégrer l'information dans l'ensemble de ses connaissances » [MONNOYER-LONGE, 1993]).

 

4.2- Intégration et conservation de cette information en interne

 

Lorsque le client souhaite contractualiser sur un produit, le commercial se met en contact avec un ou plusieurs agents de la production afin de convenir de la faisabilité de la prestation. C'est à travers le discours du commercial que l'agent de production apprend à « mettre un visage » sur le client, ce dernier étant pour lui d'abord une représentation impersonnelle. Au fil du temps, cette représentation s'estompe dans la mesure où le client pourra traiter directement avec lui un problème de SAV, par exemple.

 

Dans l'entreprise que nous étudions, la conservation de l'information relative au client se limite à la conservation des contrats, des données issues de visites, de quelques prospectus ayant trait à l'activité des clients, aux propositions commerciales. L'information client qui devrait constituer véritablement une matière première du métier et du service fourni, qu'elle soit orale ou écrite manque et est peu formalisée. C'est à ce niveau qu'un système d'information client en interne qui soit performant prend toute son importance. Pour établir un diagnostic, le commercial a non seulement besoin de posséder des capacités de réflexion mais aussi d'avoir accès à un pôle d'informations regroupées sur le client, ce qui manque pour l'instant, dans l'entreprise étudiée et qui rend difficile l'élaboration d'un diagnostic sans faille.

 

V- GERER L'INFORMATION : CETTE COMPETENCE INCONNUE

 

5.1- Une prescription du travail de plus en plus floue

 

L'activité du commercial est essentiellement prescrite dans ses buts. Son déroulement effectif ne peut être qu'observé et c'est grâce à l'observation que l'on pourra définir l'existence ou l'absence de marge de manoeuvre.

L'effectivité de l'activité repose en grande partie sur la gestion de différents types d'informations orales et informelles qui arrivent jusqu'aux commerciaux et provenant d'un large réseau d'interactions. Comme le souligne Veltz, « lorsque le travail est indissociable d'un réseau de contraintes et de relations qui débordent considérablement l'environnement proche de l'agent, il devient difficile de « localiser » la prescription » [VELTZ, 1999]. L'efficacité du travail du commercial pourrait globalement se résumer à la capacité de coordination entre front office (c'est à dire eux-mêmes), les relations clients et le back office, ce qui suppose une qualité des relations entre les différents acteurs et leur maîtrise de l'événement. Ce fait reflète aussi que la contrepartie de l'activité prescrite dans ses buts est l'autonomie dans les modes. Cette autonomie doit être lue « comme la prise en charge par les opérateurs, à titre individuel ou collectif « des blancs », « des défaillances » de l'organisation formelle qui, débordée par l'irruption de l'imprévu, est incapable d'indiquer à ses membres ce qu'il faut faire dans tous les cas de figure » [CHATZIZ, 1999]. Ces coopérations latérales ne résultent en aucun cas d'une coordination hiérarchique mais d'une prise d'autonomie à la base.

 

5.2- Relation de service et valeur du lien social

 

Les mutations économiques appellent la solidarité des fonctions, des acteurs, des activités et des buts. Une coopération ouverte et non programmée est de plus en plus intense et permet d'atteindre l'efficacité.Le cadre de l'activité des vendeurs dépasse largement les frontières de l'équipe. La réalisation complète du service ne se fait que parce que l'ensemble des interlocuteurs (clients, vendeur, production) concernés par ce service y participent. Le vendeur est à la fois à l'amorce du service, et il est en même temps le lien qui permet à tous les maillons de la chaîne de rester entrelacés et unis. Unis, car sans union il n'y a pas le résultat escompté, entrelacés parce que les métiers sont interdépendants. L'un peut difficilement « survivre » sans l'autre. Il s'agit donc ici de considérer le rapport entre l'interaction avec les collectifs de travail. Ceux-ci (vendeurs/production), sont à la fois provisoires quand il s'agit de résoudre un problème, mais aussi stables puisque les relations entre les divers membres se répètent. Un système de coopération se met en place afin de pouvoir « maîtriser » l'action. Ces échanges, verbaux le plus souvent, aboutissent à l'élaboration d'une stratégie commune, à une certaine planification du travail afin de répondre à la demande. A travers ces interactions, ce sont des savoirs individuels qui s'ajustent et peuvent, à terme, engendrer un savoir commun.

 

VI- SERVICE ET RELATION DE SERVICE

 

6.1- Quelle approche du service ?

 

Nous proposons de définir les contours de la notion de service à travers les concepts développés par Philippe Zarifian car il s'intéresse précisément à la relation entre la valeur de service et les compétences professionnelles. Comme le précise Zarifian, la notion de service intègre celle de la valeur. Il distingue d'une part ce qui constitue les services, et d'autre part le service. « Les services sont perçus soit comme des accompagnements

(SAV, services de publicités...), soit comme un taux de service centré sur l'engagement de réactivité et de conformité de produits à destination du client » [ZARIFIAN, 2001]. On s'attache ici à la manière dont le client perçoit et reçoit le produit, ainsi qu'à la qualité de la prestation. Cette approche vient se distinguer de celle qui intègre la valeur de service et qui nous intéresse tout particulièrement pour cette recherche, sachant que nous envisageons le service comme «  une transformation dans les conditions d'activité du destinataire. La valeur va s'apprécier au point de rencontre entre deux jugements : un jugement sur la validité des effets engendrés par le service, et un jugement sur l'efficience des ressources mobilisées pour engendrer ces effets

 

6.2- Les effets du service

 

Le service va donc être évalué par rapport aux attentes préalables envisagées, aux effets qu'il a engendrés et à la manière dont il a été obtenu. Le service n'est donc pas le processus de prestation mais l'effet dans les conditions d'exercice du destinataire. Dans la mesure où nous estimons que le client peut intervenir dans la création du service, il est fondamental de s'intéresser à la combinaison de l'effets provoqué par le produit lui-même ainsi que  l'effet induit sur son mode d'usage.

 

6.3- Service et compétences, des notions qui pourraient être liées

 

Nous considérerons la valeur de service à partir des ressources[2] en s'intéressant au rôle de la compétence professionnelle que nous concevons comme  « une attitude sociale de prise d'initiative et de responsabilité sur des situations concrètes, auquel l'individu se confronte et qu'il doit assumer » [ZARIFIAN, 2001]. La compétence professionnelle pourrait s'exercer à travers la capacité d'interprétation et de compréhension des attentes du client du point de vue des effets à engendrer. Il faudrait prendre en considération ce qui constitue l'activité du client dans le présent comme dans le futur ainsi que les usages à venir du service apporté. Cette interprétation s'exécuterait entre ce que le prestataire retient de ce que lui dit le client (les effets à produire pour lui) et ce que le prestataire a accumulé comme informations diverses. La compréhension viendrait en aval car il s'agirait d'identifier le sens que le client donne à la transformation qu'il souhaite de son activité, en intégrant également les problèmes à résoudre. C'est là que se noue, selon Zarifian,  « une communication authentique ». Cette compréhension serait effective  « grâce à l'expérience déjà acquise du salarié, aux acquis organisationnels (connaissances capitalisées des situations d'usages des clients, compréhension des problèmes et des solutions grâce aux échanges développés dans les collectifs de travail) et à la compétence du back office. » Le but serait bien de produire une solution pour laquelle il ne faut pas omettre que le client peut être aussi une ressource.

Pour l'instant ces réflexions restent au stade du conditionnel car un management stratégique de l'information et des compétences n'est pas encore réalisé dans l'entreprise que nous étudions.

 

VII- VERS UN MANAGEMENT DES CONNAISSANCES ET DES COMPETENCES

 

7.1- Pérenniser les savoirs

 

Si un cadre prescrit dans la relation à mener avec le client existe, il n'en reste pas moins que chaque vendeur va développer des techniques, des savoirs individuels auprès des clients (autant internes qu'externes), qui échappent en grande partie à l'entreprise et qui ne sont pas exploités pour les agents qui vont prendre la relève. L'existence de groupes de travail non formalisés est bien réelle mais le partage des connaissances qui en découle n'est pas pris en considération dans les résultats. Les équipes ne se trouvent pas forcément à l'endroit où on les pressent en amont. Une évaluation commune des résultats « de ces équipes informelles » valoriserait la diversité des fonctions impliquées dans la prestation de service. La notion de responsabilité serait, de ce fait, élargie et transversale.

 

7.2- Faire de la veille sans le savoir

 

Le commercial constitue à lui seul un noeud d'informations (key personn). Son activité l'oblige à adapter sans cesse l'information qu'il reçoit pour en faire bénéficier les acteurs internes comme externes. Dans le contexte économique actuel, une des compétences à faire évoluer et à reconnaître est celle de « chasseur d'informations », d'acteur d'une veille informationnelle. Il s'agit de savoir cibler l'information afin qu'elle devienne utile et nécessaire à l'efficacité individuelle et collective. Les commerciaux qui exercent cette nouvelle compétence n'ont pas la représentation professionnelle correspondante à l'activité exercée. « La tenue de cette activité peut être perçue comme une activité exercée en plus de ce que l'on considère comme relevant de son métier, et pour laquelle on a le sentiment de ne pas avoir été formé. Lorsque l'activité nouvelle est constatée par eux dans un sentiment de maîtrise de la compétence correspondante, elle est souvent considérée comme non reconnue à la hauteur où elle devrait l'être » [BESSON., MAHIEU, 2000]. Ce « repérage de ressources immatérielles devrait contribuer à l'élaboration d'un management des connaissances » [DEJOUX, 2001].

 

VIII- CONCLUSION

 

Rapprocher le client de ses préoccupations engendre l'obligation d'une cohérence entre l'offre de service et les ressources mobilisables pour atteindre la satisfaction du client. Plus le client est proche, et plus l'intelligence, la créativité, l'initiative sont invitées à se mettre en oeuvre. La relation de service qui en découle est une situation d'apprentissage permanente pour l'ensemble des protagonistes. Il est difficile d'identifier des compétences qui peuvent être récurrentes comme évanescentes quand il s'agit de répondre à un problème impromptu. Mais c'est pourtant dans l'événementiel que les « gisements d'intelligence » s'activent. La succession des situations imprévisibles est à la base de l'acquisition toujours en renouvellement des compétences des commerciaux. A cet égard, l'arrivée des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans l'offre pourrait accélérer le processus de développement des compétences dans l'activité elle-même mais aussi auprès des clients. La fonction de conseil et d'écoute pourrait en être d'autant plus décuplée, ce qui demanderait en contre partie plus de qualification de la part de la force de vente. Face à ces technologies nouvelles, le facteur d'innovation serait justement cette capacité à être proche, d'où l'importance accrue de détenir l'information utile et de savoir la partager entre acteurs d'un même projet. S'orienter vers l'innovation signifie, parallèlement, reconnaître le savoir acquis, pour le développer et le capitaliser. On trouve là le fondement du management des compétences.


Références bibliographiques

 

BESSON P.,  MAHIEU C., « Construire une compétence stratégique locale : enjeux, contraintes et potentialités », CLAREE, IAE de Lille, 2000.

 

BOUGNOUX D., « Qui a peur de l'information ? », 8è Congrès national de la SFSIC : les nouveaux espaces de l'information et de la communication, 21-23 mai 1992.

 

BOURRE R., DARREON J.L., « Quand l'information était du pétrole gris...Variations autour d'une métaphore », Sciences de la Société n°29, Toulouse, Les Cahiers du LERASS, 1993.

 

CARMAGNAT F., « Producteurs et usagers de systèmes d'information : un rendez-vous manqué ? Le cas de bibliothèque de France », Sciences de la Société n°29, Toulouse, Les Cahiers du LERASS, 1993.

 

CHATZIZ K., « De l'autonomie par l'indépendance à l'autonomie dans l'interaction ? », L'autonomie dans les organisation : quoi de neuf ?, Paris, L'Harmattan, 1999.

 

DE CERTEAU M., L'invention au quotidien : 1. Arts de faire, UGE, coll. 10/18, 1980.

 

DEJOUX C., Les compétences au coeur de l'entreprise, Paris, Ed. d'Organisation, 2001

 

GUYOT B., « Quelques problématiques pour éclairer l'étude de l'information dans les organisations », Sciences de la société, n° 50/51, Mai/Octobre 2000.

HATCHUEL A., L'expert et le système, Paris, Economica, 1992.

 

MISPELBLOM F., « Le secret des services : les clients, acteurs autant qu'objets de travail », Revue française de Marketing, n°134, 1991.

 

MONNOYER-LONGE M-C., « Le traitement de l'information dans une étude notariale », Sciences de la Société n°29, Toulouse, Les Cahiers du LERASS, 1993.

 

VELTZ P., « L'autonomie dans les organisations : de quoi parle-t-on ? », L'autonomie dans les organisation : quoi de neuf ?, Paris, L'Harmattan, 1999.

 

ZARIFIAN P., Valeur de service et compétence, article proposé aux Cahiers du Genre, 2001

 

 



[1] Il est demandé aux commerciaux de passer environ 80 % de leur temps en clientèle et en prospection. Pour nous, la sphère du client est non seulement une réalité physique, mais aussi une réalité mentale pour le commercial, qui, même lorsqu'il complète un dossier à son bureau a l'esprit « chez le client ».

[2] Le terme ressource étant entendu comme les moyens pris en considération : les compétences, l'information...